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Après avoir grandi toute mon adolescence en Dordogne, c'est finalement assez récemment que j'ai découvert les peintures pariétales de Lascaux. Malgré que ce soit une reproduction j'ai immédiatement senti une connexion très forte avec ma vocation. Comme si un courant invisible reliait les premières peintures de l'Humanité avec le langage cinématographique. Certains animaux semblaient capturés dans un arrêt sur image, alors que d'autres mis les uns à la suite, composaient une série d'images rappelant l'animation. Immobilisme et mouvement. S'il on pense en plus que les stalactites d'autres grottes portent des marques de percussions régulières, on est pas loin du tout d'un film sonore. Qui sait, peut-être ces espaces sacrés étaient-ils destinés à évoquer des récits mythiques, à l'aide d'images et de musiques. Lascaux, premier cinéma parlant ?

Et si, comme les rites chamaniques, le cinéma avait le potentiel d'être un psychotrope ? Un Art pour obtenir de nouvelles visions ? Cette intuition je cherche à la tester en interrogeant les images d'autres cinéastes et artistes visuels, dans la série d'analyse filmique "Enquête d'images", mais aussi dans des expériences visuelles ("XP ciné-chamanique"). Ces deux formats vidéos sont à retrouver sur la chaîne YouTube "ciné-chamanisme".

nos angoisses - XP ciné-chamanique 1

Les histoires d'inconnus s'entremêlent. Leurs mains trahissent leurs pensées. Sommes-nous ce que nos mains donnent à voir ?

Les premières représentations picturales de l'Humanité comportent des empruntes de mains. Réalisées par projection de pigments, ces mains imprimées sur les parois des grottes sacrées nous informent autant sur les artistes que sur leur vision du monde. La main, pour signifier qu'on est ce qu'on fait, mais aussi qu'il n'y a pas de séparation entre l'action et la pensée.

pour qui sont ces vitrines qui brillent dans la nuit ? - XP ciné-chamanique 2

Paris, 25 octobre, 5h du matin. Couvre-feu pour limiter la circulation du virus Covid-19. Les rues sont vides et pourtant les vitrines des magasins sont illuminées. Pour qui les mannequins sont éclairés ?

le dernier qui s'en va... - XP ciné-chamanique 3

Un soir de bascule entre deux mondes. Les fenêtres photographiées durant le confinement de la crise du COVID-19 servent de miroir aux peurs comme aux espoirs du monde d’après.

La séquence peut paraître surréaliste, car la juxtaposition des fenêtres est un artifice. Aucun drone n'a filmé cette scène et pourtant les échos lointains de la ville contribuent à l'oppression ressentie durant deux mois d'enfermement.

"Il y aura un monde d'après", dit-on alors que je termine ce film. Peut-être pas en un soir, mais inventons d'autres espaces, d'autres limites et d'autres échos sonores, afin qu'il puisse ressembler à ce qu'on voudrait.

la disparition - XP ciné-chamanique 4

Une loi prévoit d'interdire la diffusion d'images de policiers en service ; plus leurs visages disparaîtront, et moins on verra les personnes derrière la fonction. J'ai fait ce film pour exorciser la peur que je ressens vis-à-vis de cette loi.

toutes ces images sur moi - XP ciné-chamanique 5

Le quotidien d’une jeune femme au travers des commentaires sur son apparence et les événements qui la questionnent sur l’image qu’elle a d’elle-même. Filmé dans le reflet de son œil.

De plus en plus, mes amies, ma sœur ou mon amoureuse me parlent des inégalités entre hommes et femmes, de la pression qu’elles ressentent à devoir se conformer à une certaine image. Plus difficilement parfois elles témoignent être tiraillées entre plusieurs images de soi. Les injonctions même positives se retrouvent ainsi en tension avec les commentaires négatifs ou les modèles stéréotypés. J’ai voulu en savoir plus sur cette souffrance liée à un environnement surchargé de sollicitations et j’ai donc passé une quarantaine d’entretiens avec des femmes (soient via les réseaux sociaux soient dans la rue).

De ces 40 témoignages, j’en ai tiré une série de scènes du quotidien et de commentaires pour en faire un film. On voit les différents événements et images qui sont autant de sollicitations stressantes, et on entend les différents commentaires dans une accumulation de plus en plus déstabilisante ; jusqu’à un point d’orgue, après lequel j’ai tenu aussi à mettre des moments rapportés comme étant “ces moments où on peut faire la paix avec son corps.”Un œil en plan séquence, mais à chaque clignement d’œil, il y a un changement d'image dans le reflet de l'iris. On ne sort de cet extrême gros plan qu’à la toute fin, lorsque la caméra recule. Pourquoi ce cadrage ? Je veux créer un effet claustrophobie, qu’on sente une gêne à être aussi près. Il me semble aussi important de signifier où se joue cette guerre des images. Rester uniquement en point de vue subjectif tendrait à renvoyer cette guerre à une question d’intériorité. Or c’est bien tout un environnement toxique et son effet sur une personne que je veux mettre en scène, en même temps. Ainsi se joue dans la même unité : action et réaction, champ et contrechamp.

souviens-toi de la forêt - XP ciné-chamanique 6

Une traversée hypersensorielle de la forêt et de ses habitants, avant qu’ils ne disparaissent. Une créature traverse la forêt, animale et surnaturelle à la fois. Elle s’arrête pour saluer les habitants, tandis que la présence humaine se fait de plus en plus agressive. Les sons de la forêt se métamorphosent, tandis qu’on se rapproche de plus en plus de la frontière avec la civilisation. J’ai fait ce film dans l’urgence, alors que les forêts de Sibérie puis d’Amazonie se sont enflammées. J’ai la chance d’avoir grandi près d’une forêt, minuscule et pourtant bien vivante. Pour la célébrer, je l’ai prise en photo, pas à pas, créant cet effet d’accéléré qui a nécessité pourtant beaucoup de patience. La forêt se réduit, se morcelle, ses habitants disparaissent. Alors je convoque leur esprit avec mes outils.

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adaptation(s) - XP ciné-chamanique 7

La covid 19 nous oblige tous et toutes à nous adapter. Des choses évidentes comme planifier un week-end ou juste se voir en couple, sont devenues pour certains et certaines des casse-têtes. Le fait d'être toujours à la merci d'une annonce gouvernementale, de n'avoir que très peu de visibilité d'une semaine à l'autre nous met dans une situation psychologique très difficile.

Le virus aussi s'adapte et au fond met tout ce qu'on pourrait imaginer pour survivre en tant qu'être vivant. J'ai donc voulu créer un espace artistique où humains et virus se rencontrent, d'où l'idée d'incruster un masque d'images macroscopiques (fleurs, mousses, branches, graines, etc.) qui rappellent la très grande et très bizarre famille des êtres vivants. Cette histoire est quand même racontée du point de vue de deux humains, qui éprouvent des conséquences très concrètes de cette nouvelle cohabitation.

cinq planètes avant le vide - XP ciné-chamanique 8

l'écran est devenu noir d'un coup - XP ciné-chamanique 9

En étant sur nos smartphones la plupart du temps, nous accédons à des milliers de sensations visuelles et auditives, mais nous cela nous éloigne des milliers de textures et matériaux qu'on pourrait toucher. Vous pouvez aussi prendre ce film comme de l'ASMR pour les yeux !

le rayon vert - XP ciné-chamanique 10

fleurs mêlées- XP ciné-chamanique 11

Une abeille peut voir les ultraviolets, ce qui lui permet entre autre de repérer le pollen sur les fleurs. Le glyphosate et les pesticides néonicotinoïdes perturbent les réseaux neuronaux des pollinisateurs, dont les abeilles. Et si le monde changeait subitement de couleurs ? Dans un dernier trip psychédélique, une abeille meurt et voit défiler devant ses yeux, sa vie, toutes les fleurs qu'elle a pu voir.

douleurs peintes- XP ciné-chamanique 12

Mathilde souffre d''endométriose, ce qui provoque des douleurs tous les jours. En tant qu'illustratrice elle cherche des moyens pour montrer sa souffrance invisible et les conséquences sur sa vie. Suivez le travail de Mathilde sur son compte instagram @lavieacroquer et sur son blog "la vie à croquer". Même si elle est souvent invisible, l'endométriose touche 1 à 2 femmes sur 10, avec un retard de diagnostic d'environ 10 ans. L'association ENDOmind agit depuis 2014 pour relayer la parole de millions de malades et leur permettre de mettre des mots sur leurs maux. Pour faire entendre leurs voix et celles de leurs proches, adhérez à l'association ENDOmind ou faites un don.